TUB, TUC et Type G, la préhistoire du Type H

LE TUB

En 1935, Citroën comprend qu'il manque dans le marché des utilitaires, un vrai véhicule à traction avant avec une charge utile comprise entre 500 et 850 kg en remplacement des Rosalie utilitaires.
Pour la version 500 kilos on se contente de dériver une version commerciale de la Traction 11 B familiale, pour la version 850 kilos il en va tout autrement.
 
Eté 1936, Pierre-Jules Boulanger se voit remettre un épais dossier constitué de photos, croquis, statistiques et descriptions précises de l'utilisation de ces utilitaires en tournées de porte-à-porte.
Il ressort de cette enquête que les utilisateurs ont besoin d'un véhicule à cabine avancée dans lequel ils puissent se tenir débout et leur permettant d'accéder à l'arrière depuis le poste de conduite, un véhicule avec une porte latérale coté trottoir afin de faciliter les opérations de chargement/déchargement.
Automne 1937, le bureau d'études achève le premier prototype roulant d'un nouveau véhicule utilitaire ne ressemblant à rien de connu.
Le 12 mai 1939 les services des mines examinent un utilitaire baptisé 7-T série U portant le numéro de châssis 900000 et équipé du moteur TB 00032.
Le TUB est né, c'est l'innovation!
Il doit son nom à l'abréviation de Traction Utilitaire Basse. 
Il emprunte le moteur quatre cylindres 35 ch de la 7C (9CV) placé en porte-à-faux avant. Le châssis est constitué de deux longerons contre-coudés, le plancher avant est assez haut pour loger la mécanique et permettre l'agencement d'une cabine avancée, un plancher de charge le plus bas possible (seuil de chargement de 42 cm) permettant à un homme de se tenir débout (hauteur intérieure de 1,75 mètres), la porte latérale est coulissante, une nouveauté fondamentale en matière d'utilitaire léger.
La carrosserie est très simple, la fabrication avait été confiée au carrossier Fernand Genève.

Tub1

Quelques données :

  • Voie avant: 1,48 m
  • Voie arrière: 1,61 m
  • Hauteur : 2,13 m
  • Hauteur intérieur : 1,75 m
  • Longueur du plancher plat: 3,30 m
  • Pneus : 16 x 45 ou 16 x 50
  • Suspension AV par barres de torsion et AR par lames 
  • Volume utile: 7 m3
  • Poids à vide: 1330 Kg (TUB), 1380 Kg (TUC)

Sur les deux côtés à l'arrière on trouve des rideaux en toile de bâche percés de fenêtres en matière transparente souple. Celui de droite est fixé à demeure, celui de gauche peut-être roulé et relevé jusqu'à la gouttière de toit. Une fois l'auvent ouvert l'on accède au volume utile de plus de 6 m3 après avoir enlevé le panneau arrière démontable.

La roue de secours et la batterie sont placées dans des coffres extérieurs à gauche, bien accessibles et sans aucun contact possible avec la marchandise.
La mécanique est héritée de la 7 CV, ainsi que la boîte de vitesse et le train avant à suspension par barres de torsion. Le train arrière est du type conventionnel avec des ressorts à lames semi-elliptiques.
Toujours emprunté de la Traction, le freinage est entièrement hydraulique avec les tambours à six tocs des 11 CV.
Il fut commercialisé le 5 juin 1939 au prix de 36000 francs.
L'année suivante, le 13 février 1940, le service des mines homologue le 11-T série U, le premier véhicule porte le numéro de série 950 001.
Bien que les TUB 7 CV et 11 CV aient la même charge utile de 1020 Kg, on peut les distinguer car le 7CV ne possède qu'un seul essuie-glace coté passager, on trouve en bas de la carrosserie un ourlet en tôle symbolisant un pare-chocs, il a deux orifices de remplissage d'essence et la trappe d'accès à la batterie est lisse (contrairement à celle du 11 CV qui est percée de quatre ouïes).
Pendant la guerre, le 23 juin 1941, apparaît le Type 11-T série U-C ou TUC (Traction Utilitaire de type C). Quelque légère modification le diffère du TUB, le plus important pour l'utilisateur, la charge utile passe de 1020 Kg à 1200 Kg.
Il existait aussi en version ambulance, le TAMH.
Très peu de ces curieux véhicules furent vendus, sa diffusion limitée par la guerre ne dépasse pas les 2000 unités.
1946, premier et dernier Salon de l'automobile pour ce véhicule sans espoir de remise en fabrication, son successeur le Type H, étant déjà prêt.
 

Source de l'article: http://deuch.perso.libertysurf.fr

LE TYPE G

Les études du Type G démarrent en 1948, au moment où va être commercialisé le Type H. Il s'agit d'un utilitaire intermédiaire entre la 2CV dont il reprend la motorisation et le Type H dont il est la réduction.
La consigne est toujours la même, l'économie!
La plate-forme et les organes de liaison au sol sont l'oeuvre des ingénieurs Boisse et Bernard et à la tête de l'étude on retrouve l'irremplaçable ingénieur Lefebvre à qui l'on doit des chef d'oeuvre comme la Traction, la 2 CV, le Type H.
Il n'y a pas de source certes, certains nous annoncent que le Type G possède un moteur de 425 cm3 (moteur qui date de 1955), des autres annoncent un moteur de 475cm3. Mais puisque l'équipe devait puiser au maximum dans la banque des pièces communes des véhicules Citroën afin de réduire les coûts, il est probable que ce véhicule dispose tout simplement d'un 375cm3 avec une boîte de vitesses 2 CV, le tout retenu par un berceau avant comme sur toutes les tractions avant.
Les sièges ont le style de ceux des utilitaires d'avant-guerre, le même revêtement que les premiers Type H.

Le Type G est monocoque, entièrement tôlé, sans ouverture latérale. Le toit de la cabine est en tôle nervurée. Deux poulains remplacent le pare-chocs arrière, le pneu de secours ainsi que le réservoir d'essence se trouvent à droite, dans un compartiment qui se trouve dans le prolongement du passage de roue. Les glaces arrières sont en Mica posées avec des baguettes alu. Le portes sont une copie réduite de celles du Type H, mêmes poignées. Le deux essuie-glaces à main ne risquent pas de tomber en panne !

Le Type G aurait dû prendre le rôle du petit frère utilitaire de la 2 CV (la célèbre fourgonnette 2 CV n'existait pas encore à l'époque).
A cause de ses faibles performances en charge, l'idée tomba à l'eau en faveur de la célèbre fourgonnette AU extrapolée directement de la 2CV.
Le Type G aurait dû disposer d'un moteur plus puissant mais la banque des pièces était restreinte et à mi-chemin entre le moteur 375cm3 de la 2 CV et le 1628cm3 de la Traction 7 CV il n'y avait rien.

G

Quelques données :

  • Largeur: 1,65 m
  • Longueur : 3,40 m
  • Hauteur : 2 m
  • Hauteur intérieur : 1,59 m
  • Pneus : Michelin Pilote 145 x 400
  • Suspension par barres de torsion
  • Capacité du réservoir : 22 l

Des deux prototypes seulement celui ci-dessus a survécu et existe toujours à l'usine d'Aulnay, sa plaque des Etudes porte la mention ELV 1945 (Etude Lancement Véhicule). 
Il fut réalisé entièrement à la main, suant sang et eau pour arriver à ce résultat.

Source de l'article: http://deuch.perso.libertysurf.fr

LE TYPE H

Chez Citroën on parlait déjà avant la guerre d'un nouveau véhicule utilitaire qui remplacerait son prédécesseur. On voulait gagner du poids et de la place et puis le TUB avait un défaut, s'il n'était pas chargé à l'arrière il relevait du cul.
Il avait vieilli et il était plus facile de créer un tout nouveau modèle, plus moderne.

Le cahier des charges voulu par Boulanger : 
un véhicule monocoque à traction avant et qui reprend les éléments de la Traction 4 cylindres avec une bonne suspension arrière et surtout tout en conservant le maximum de pièces existantes déjà sur les autres modèles.

C'est Pierre Franchiset le père du Type H, il travaillait chez Citroën à la conception et à la mise au point des carrosseries, c'est lui qui a pensé le H, qui a suivi sa conception jusqu'à la commercialisation. Il a reçu le projet, il a déterminé l'ensemble du véhicule, il a réalisé le premier prototype. 
Pendant la grande guerre les études du H ont été lancées en cachette des occupants qui avaient interdit d'étudier de nouveaux modèles, les conditions de travail n'étaient pas des meilleures, il n'y avait pas d'essence, pas de matières premières. Une fois la guerre finie le H a été terminé très rapidement. 
Il était entièrement réalisé en tôle ondulée, Franchiset avait pris de la tôle de 5/10e et pour la rigidifier l'avait emboutie nervurée, un principe utilisé dans l'aviation bien avant le H. Au point de vue solidité il était exceptionnel !
Il y avait des charnières " Yoder " partout, volets de coté, volets de roue de secours, réservoir, portes, capot moteur intérieur, capot avant, etc. Il s'agit de charnières réalisées par pliage des tôles, on le trouve aussi sur la Traction et plus tard sur la 2CV.
Il n'y a pas eu beaucoup de prototypes comme pour la Deux Chevaux, seulement deux. Il n'y a pas eu de maquettes réduites non plus, on est parti directement sur le premier prototype.

Ce premier prototype avait à l'origine une porte latérale pivotante, porte qui encombrait le trottoir à l'ouverture et n'était pas pratique quand on voulait descendre. 
Le second prototype avait une porte coulissante, ce n'était pas difficile de modifier le véhicule car il n'avait que des lignes droites....

Sur les prototypes on avait mis une couche de peinture pour qu'ils ne rouillent pas, c'était du gris métal. Il y avait certainement des stocks de cette peinture car en ce temps-là on sortait des Tractions gris métal ; le Type H est donc né comme ça, gris. 
Il est né gris et il est mort gris. 
Pour le concevoir à une telle vitesse il était évident que plusieurs ensembles (mécanique, essieu de la Traction 15 élargi, tableau de bord, poignées de portes, etc.) soient empruntés à la Traction Avant. Même la petite 2CV, elle aussi gris métal, prêta quelque chose (sièges, phares, etc.). Ils ont en commun la même solidité, la simplicité, la génialité.
Le Type H, au contraire de son prédécesseur TUB qui avait un châssis et une coque, est monocoque et, bien évidemment, traction avant.
Toute pièce est étudiée afin d'obtenir le maximum au moindre coût : le pare-brise était en deux moitiés (si une partie était abîmée, on ne devait pas remplacer la totalité), de la toile remplaçait les panneaux de porte, la lunette arrière était de dimension très réduite, .... même sur le nom Citroën avait fait des économies, il arrivait huitième d'une série d'études et c'est pourquoi on l'appela "H", la huitième lettre de l'alphabète, sans chercher plus loin.
On dit que le H était prêt pour le Salon de 1946 mais Pierre Boulanger (à l'époque directeur de Citroën) refusait de l'exposer car il ne voulait pas faire comme certains et séduire la clientèle avec un modèle qu'il ne pouvait pas encore fabriquer.
En 1947 Citroën présenta le Type H, 11CV, 1200 Kg de charge utile.
La bombe " H " du " Quai de Javel " explosa au Salon de l'Automobile de Paris en octobre 1947, dans un climat de pauvreté et d'ingéniosité. Tout est recyclé, les voitures d'occasion (véhicules militaires américaines et quelques berlines) sont rares et coûteuses, exploitées jusqu'à la dernière tôle restante, et ensuite retapées. Les utilitaires sont rares et souvent les voitures sont transformées en camionnette. Même si certains artisans réalisent de petites merveilles, la plupart de ces véhicules sont bricolés.
Le Type H entre en commercialisation le 1er juin 1948.
La presse l'ignore et annonce seulement sa comparse, le 34ème Tour de France, premier de l'après-guerre passionne bien plus les foules. 
Mais le bon gros "Tube", comme on le surnomme à cause de son prédécesseur, n'a pas de rivaux et il a même les rétroviseurs de série ! 
Il démarre dans la vie sans rien demander à personne, sans publicité autre que le bouche à oreille.
Les années défilent et le Type H est toujours là, qui le possède déjà en fait de la publicité aux potentiels clients et qui ne le possède plus en achète un neuf !
Citroën ne s'en occupe pas beaucoup, un minimum de publicité, quelques mises à jour par-ci et par-là et le client est rapidement convaincu.
Paysans, éleveurs, corbillards, marchands, boulangers, jardiniers, menuisiers, brocanteurs, fleuristes, bouchers, tout le monde en a eu au moins un dans la vie, il a travaillé pour La Poste, pour la Gendarmerie, pour les hôpitaux, les administrations, il a servi les acteurs, les vacanciers, les voleurs...
Chez Citroën on dit : " à chacun son H ", toujours le même et toujours si différent.

Il y a eu deux motorisations essence (1600cm3 9CV et 1900cm3 11CV) et trois Diesel (Perkins 1621cm3 7CV, Indenor 1816cm3 7CV et Indenor 1946cm3 8CV). 
Des versions plateau nu étaient aussi disponibles pour les carrossiers (il est impossible de recenser les carrossiers qui pendant toute la longue vie du H l'ont offert au publique à toutes les sauces).
En fonction de la charge et de sa carrosserie l'appellation commerciale changeait, H, HY, HZ, HX, HW. Il y a eu aussi des équipements spécifiques pour véhicules de secours urgent et pour véhicules de réanimation et de chirurgie avec suspension arrière hydropneumatique.
14 était le nombre de coloris offerts par Citroën dont une partie réservée aux administrations.
Le gris reste la couleur la plus fréquente mais on pouvait le choisir blanc, rouge ou bleu.
300 était le nombre d'ouvriers nécessaires pour produire un exemplaire complet, que ce soit en France, en Hollande, en Belgique ou au Portugal.
Une trentaine d'années plus tard un jeune à la peau lisse (le C25) lui à piqué la place mais pas sa célébrité légendaire, sa personnalité, son caractère.
L'histoire finit le 14 décembre 1981, à Aulnay. Le dernier porte le numéro de série 473289 et il est gris. Près d'un demi-million de H ont été construit en 34 ans, un record ! 
Mais à dire vrai, l'histoire n'est pas terminée le 14 décembre 1981, le Type H est dur à mourir, physiquement et aussi dans les souvenirs de ceux qui l'ont eu et apprécié.
Il roule toujours peinard avec ses publicités sur les cotés, avec son vêtement de travail gris ou les plus chanceux sont devenus des camping-cars.

Source de l'article: http://deuch.perso.libertysurf.fr

Type h

Extrait d'un catalogue publicitaire des années 70 :

  • Les dix atouts du Type H :
    • Accessibilité maximum
      les portes sont strictement rectangulaires
    • Accessibilité mécanique
      le moteur est à portée de votre main
    • Confort des sièges
      vous êtes aussi bien installé que dans votre voiture
    • Suspension nouvelle
      elle a fait l'unanimité
    • Tenue de route
      c'est une " traction avant "
    • Braquage
      aussi maniable qu'une petite voiture !
    • Robustesse
      légendaire
    • Plancher plat
      à 35 cm du sol seulement
    • Prix d'achat
      comparez avec leurs concurrents
    • Coût d'utilisation et d'entretien
      ils battent tous les records d'économie

Date de dernière mise à jour : 07/09/2018